Soupirs d'exaspération. Gestes saccadés manifestant une certaine contrariété. Lady Peggy était sur le point de se départir de son flegme britannique. Elle faisait les cents pas dans le hall menant à la salle de bal.
"What is she doing ?*" marmonna-t-elle.
Jamais sa chère Pool n'aurait laissé une lady de sa condition attendre dans un lieu inconnu, de surcroit seule. A moins que sa poulette ne se soit fait prendre ? Etait-ce un traquenard ? Damned, devait-elle prendre en considération la possibilité d'un coup typiquement napoléonien avant l'heure ?
Mains gantés qui serrent et déserrent le mouchoir en dentelles aériennes de Bruges.
Un homme sortit brusquement de la salle du bal. Cri muet de panique de la Coe Sean. Elle n'eut que le temps de se plaquer contre la boiserie ouvragée d'un mur avant que l'homme disparaisse à sa vue.
Elle l'avait échappé belle. Petit frisson à l'idée qu'elle aurait pu terminer en cotelette. Très long soupir de soulagement avant de prendre conscience de l'habit de l'homme : un uniforme ! avec un blason qu'elle connaissait bien. Regard azurien vers la direction que l'inconnu avait pris. C'est le vestibule, n'est-il pas ?
Lèvre inférieure mordillée signifiant une intense réflexion. Soudain, généreuse poitrine se faisant ferme, décision fut prise.
"As your late husband, rest in peace, poor darling, used to say, you can do it, my Peggy**"
La Coe Sean prit donc la même direction que l'homme en uniforme, laissant dans son sillage un capiteux parfum.
* "Que fait-elle ?"
** "Comme ton défunt mari, paix à son âme, pauvre chéri, avait l'habitude de dire, tu peux le faire, ma Peggy"